Jacques Vaché

Jacques Vaché, né à Lorient le 7 septembre 1895 et mort à Nantes le 6 janvier 1919, est un écrivain et un dessinateur français qui n'a laissé pour toute œuvre qu'une série de lettres, quelques textes et quelques dessins.



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Écrivain français du XXe siècle - Dadaïsme - Surréalisme - Naissance en 1895 - Naissance à Lorient - Décès en 1919

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Jacques Vaché, né à Lorient le 7 septembre 1895 et mort à Nantes le 6 janvier 1919, est un écrivain et un dessinateur français qui n'a laissé pour toute œuvre qu'une série de lettres, quelques textes et quelques dessins. Sa personnalité a exercé une profonde influence sur les surréalistes et tout spécifiquement André Breton.

Biographie

Issue d'une famille d'origine anglo-irlandaise, il fait preuve dès 1913 de talents littéraires. À Nantes, au lycée Clemenceau, avec la collaboration de ses camarades Pierre Bisserié et Jean Bellemere, il fait paraître une revue ayant pour titre "En route mauvaise troupe", en hommage à Paul Verlaine[1] qui ne connait qu'un unique numéro. La tonalité du contenu, qualifiée de «subversive et pacifiste» — indépendance d'esprit, liberté de critique et haine des bourgeois, des conventions et de l'armée — lui valent d'être exclu de l'établissement. Suivent dans le même esprit quatre numéros du "Canard sauvage".

Mobilisé en août 1914, envoyé au front, puis blessé, il est rapatrié à Nantes pour y être soigné. À l'hôpital de la rue Marie-Anne du Boccage, pour passer le temps, il peint des cartes postales représentant des figures de mode accompagnées de légendes bizarres.

En janvier 1916, il fait la connaissance d'André Breton et de Théodore Frænkel[2] affectés comme internes en médecine. Breton est aussitôt séduit par l'attitude de ce «jeune homme particulièrement élégant, aux cheveux roux», qui lui fait connaître Alfred Jarry, oppose à tous la «désertion au sein de soi-même»[3] et n'obéit qu'à une loi, «l'umour (sans h)». «Lorsque Jacques Vaché vous serre la main ce n'est ni pour dire bonjour ni au revoir.» Dans un document radiophonique, la mère de Jacques Vaché, évoquant le souvenir de son fils, raconte que Breton «ne saluait jamais». [4] Quant à Frænkel, Vaché le surnomme dans ses lettres "le peuple polonais" et le prend pour modèle pour sa nouvelle «Le Sanglant symbole» (personnage de Théodore Letzinski).

Au mois de juin, Jacques Vaché, qui parle fréquemment l'anglais, est renvoyé au front comme interprète auprès des troupes britanniques. Le contact avec Breton reprend au mois d'octobre avec une première lettre : «Je promène de ruines en villages mon monocle de cristal et une théorie de peintures inquiétantes -, j'ai successivement été un littérateur couronné, un dessinateur pornographique connu et un peintre cubiste scandaleux.»[5]

Le 24 juin 1917, au cours d'une permission, il assiste à la première de la pièce de Guillaume Apollinaire, «Les Mamelles de Tirésias», sous-titré drame surréaliste. Le spectacle tourne au fiasco. Déguisé en officier anglais, revolver au poing, il somme de faire cesser la représentation, qu'il trouvait trop artistique à son goût, sous menace d'user de son arme contre le public. Breton parvient à le calmer. [6]

Lettre du 18 août 1917 à André Breton : «L'art est une sottise - Presque rien n'est une sottise - l'art doit être une chose drôle et légèrement assommante - c'est tout […] D'ailleurs - l'Art n'existe pas, probablement - Il est par conséquent inutile d'en chanter - pourtant : on fait de l'art - parce que c'est comme cela et non autrement - Well - que voulez-vous y faire ?»

Lettre du 19 décembre 1918, la dernière : «Je m'en rapporte à vous pour préparer les voies de ce Dieu décevant, ricaneur légèrement, et terrible en tout cas. Comme ce sera drôle, voyez-vous, ce vrai ESPRIT NOUVEAU se déchaîne».

La mort de Jacques Vaché

Le 7 janvier, le journal "Le Télégramme des province de l'Ouest" annonce la découverte, la veille, des corps dénudés et gisants sur un lit, de deux jeunes hommes dans une chambre de l'hôtel de France, place Graslin à Nantes. Ils auraient succombés à l'absorption d'une trop forte dose d'opium. Un troisième homme, un soldat américain du nom d'A. K. Woynow, avait tenté de trouver du secours mais il déjà était trop tard. Les deux victimes sont présentées comme de "jeunes écervelés" sans expérience de la drogue en même temps que comme "de braves soldats qui avaient fait leur devoir devant l'ennemi et avaient été blessés". [7] Pour préserver l'honneur des familles, il n'est fait mention que des prénoms et de l'd'origine du nom. [8] Un autre journal nantais, "Le Populaire", précise dans son édition du 9 janvier, que l'opium avait été apporté par Vaché et cite le témoignage de son père qui dit avoir vu "un pot en faïence recouvert et ficelé" qu'il a pris pour un pot de confiture. [9]

Ce que les journaux ne racontent pas c'est la présence dans la chambre de deux autres personnes : André Caron, membre du groupe de Nantes et un dénommé Maillocheau qui s'étaient retrouvés le 5 au soir pour fêter leur prochaine démobilisation. Une fois dans la chambre d'hôtel, Vaché sortit un pot de faïence qui contenait de l'opium dont ils confectionnèrent des boulettes qu'ils avalèrent. Maillocheau, que la drogue n'intéressait pas, s'en alla. Plus tard, Caron, rendu malade, rentra chez lui. À l'aube du 6, Vaché et Bonnet se déshabillèrent, plièrent soigneusement leur vêtements, s'installèrent sur le lit et reprirent quelques boulettes d'opium. Woynow qui avait aussi repris légèrement d'opium s'endormit sur le divan. Lorsqu'il se réveilla le soir, il constata ses deux camarades toujours allongés et immobiles, respirant à peine. Il couru chercher le médecin de l'hôtel. [10]

André Breton n'apprend la mort de son ami qu'entre le 13[11] et le 22 janvier[12] Le désarroi et le manque de précisions quant aux circonstances du décès, l'amène à penser qu'il puisse s'agir d'un assassinat. Dans une lettre adressée à T. Frænkel, le 30 janvier, il insère une coupure de journal qui associe le meurtre de Jean Jaurès, le 31 juillet 1914 à celui de Karl Liebknecht, le 16 janvier 1919 ; entre ces deux dates Breton inscrit : «? janvier 1919 : Jacques Vaché»[13]

Son influence sur André Breton

«Sans lui j'aurais peut-être été un poète ; il a déjoué en moi ce complot de forces obscures qui mène à se croire quelque chose d'aussi absurde qu'une vocation.»[14]

Dans la même lettre du 30 janvier à Frænkel, Breton joint un poème «Clé de sol», [15] qui "transpose l'émotion qu['il a] éprouvée à l'annonce de la mort de Jacques Vaché". [16] Le 3 mars, il confie à Jean Paulhan qu'il vient de connaître "l'événement de [sa] vie le plus douloureux", ce qui le contraint à porter une "cuirasse […] contre l'émotion". [17]

Au mois d'août 1919, Breton regroupe en volume les «Lettres de guerre» et en rédigé la préface : "Il y a des fleurs qui éclosent particulièrement pour les articles nécrologiques dans les encriers. Cet homme fut mon ami. "[18]

La douleur de Breton est telle qu'il est persuadé que Vaché a consciemment orchestré son suicide. Au couturier Jacques Doucet, il rédigé le 4 janvier 1921 : "Sa mort eut ceci d'admirable qu'elle peut passer pour accidentelle […] il voulut en disparaissant commettre […] une dernière fourberie drôle ". Breton reprend cette expression d'une lettre du 12 août 1918 de Vaché à Frænkel : "Je rêve de bonnes Excentricités bien senties, ou de quelque bonne fourberie drôle qui fasse énormément de morts…"[19]
En 1940, dans l'«Anthologie de l'humour noir», Breton rapporte des propos tenus par Jacques Vaché quelques heures avant sa mort : "Je mourrai lorsque je voudrai mourir… Mais alors je mourrai avec quelqu'un… plutôt un de mes meilleurs amis. "[20]
Toute sa vie, Breton n'a pu se résoudre à ne voir dans la mort de Jacques Vaché, qu'un banal accident. Il restera convaincu d'une dernière farce macabre commise par son ami. Ce dont doute Louis Aragon, Woynow et Pierre Lanoë, un ancien camarade de lycée de Vaché, avec qui il avait pris rendez-vous pour le 7 janvier. La thèse du suicide soutenue par Breton repose sur sa conviction que Vaché savait précisément ce qu'il faisait, quoique son "expérience" quant à l'usage de la drogue n'a jamais été établie. Pour lui, une mort inspirée par l'"umour" était l'unique fin digne de son ami. De même qu'il ne verra dans les circonstances de la découverte des corps nus allongés sur un lit, que les caractéristiques du dandy hautain, asexué et insensible aux tentations de la chair. Il refusera d'envisager la moindre inclination à l'homosexualité de Vaché, Breton lui-même ne manquant pas de faire état d'une rare intolérence à cet égard. [21]

Peut-être a-t-il forcé le trait en posant Jacques Vaché comme le précurseur du surréalisme. Et même s'il proclame dans le «Manifeste du surréalisme» (1924)  : «Jacques Vaché est surréaliste en moi.», dans la lettre du 4 janvier 1921, précitée, à Jacques Doucet, il présente les «Lettres de guerre» comme "une merveilleuse introduction à tout ce que recouvre […] l'étiquette Dada […]. Il y a là l'ensemble des manifestes qu'on voudra, pas une négation ne manque […]»[22]

Œuvres

dessin

Un autoportrait à l'encre et au crayon, dans lequel Vaché se représente en costume comme pour une gravure de mode est reproduit dans Les Surréalistes de Philippe Audoin, Le Seuil, 1973, p. 17.

Bibliographie

Notes et références

  1. Prologue de «Jadis et Naguère» : "En route, mauvaise troupe / Partez, mes enfants perdus ! / Ces loisirs vous étaient dûs : / La Chimère tend sa croupe. ", Lacarelle, op. cité, p. 32
  2. T. Frænkel (1896-1964) ami de Breton depuis le collège Chaptal. Élève à la faculté de médecine, il rejoint Breton à Nantes en 1915 où il fait la connaissance de Vaché. Pierre Daix «La Vie quotidienne des surréalistes», Hachette, Paris, 1993, page 424.
  3. André Breton «Anthologie de l'humour noir», 1940, édition de Jean-Jacques Pauvert, 1966, réédité au Livre de poche, 1998, page 376
  4. Documentaire diffusé sur France Culture en 1990 ou 1991
  5. Daix, p. 37
  6. Dans sa biographie sur Breton (op. cité, page 73), Mark Polizzotti doute de la véracité par conséquent. Il a remarqué que sur une vingtaine de compte rendus de ce spectacle, aucun ne mentionne la "spectaculaire" réaction de Vaché. Seul Aragon a témoigné de cet incident.
  7. Mark Polizzotti «André Breton», 1995, Gallimard, p. 100
  8. Marguerite Bonnet «André Breton. Œuvres complètes, tome 1», Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1988, page 1230 et «André Breton. Naissance du surréalisme», José Corti, Paris, 1975, page 87
  9. Bonnet, «Naissance...», page 87
  10. Polizzotti, op. cité, page 101, Raphaël Sorin «Un dernier témoin raconte l'histoire de Jacques Vaché et du surréalisme», "Le Monde", 4 décembre 1979 et (http ://lettres. blogs. liberation. fr/sorin/) et Carassou, op. cité
  11. Date de l'unique lettre envoyée à Vaché et conservée. Bonnet «AB OC 1», page 1227. Reproduite en fac-similé dans Georges Sebbag «L'Imprononçable Jour de sa mort : Jacques Vaché 1919», Jean-Michel Place, Paris, 1990
  12. Lettre à Tristan Tzara : "Ce que j'aimais le plus vient de disparaître : mon ami Jacques Vaché est mort. " Bonnet «AB OC 1», page 1294
  13. Bonnet «Naissance...», p. 148
  14. «La Confession dédaigneuse», in «OC 1», page 194
  15. «Œuvres complètes, tome 1», page 14
  16. «L'Amour fou», in «OC 2», page 734
  17. Polizzotti, op. cité, page 101
  18. Préface reprise dans «Les Pas perdus», in «OC 1», page 227.
  19. «OC 1, page 202 et note 2 page 1231 et Polizzotti, op. cité, page 102
  20. «OC 2», page 1128 et Polizzotti, op. cité, page 102
  21. Polizzotti, op. cité, pages 102 et 103
  22. «OC 1», page 1251
  23. Bonnet «AB OC 1», page 1250

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